De Jésus de Nazareth, l’histoire n’a pratiquement pas de trace. Les quelques jalons historiques que l’on peut décrypter montrent un Jésus qui n’a rien à voir avec le Christ inventé par les Évangiles plus de cinquante ans après sa mort.
Je me suis mis dans la peau d’un Jésus réel proche des recherches de Prieur et Mordillat, les auteurs de Corpus Christi, série d’émissions diffusées sur Arte.
Les études historiques dévoilent que Jésus est un bâtard né d’une prostituée. Prostituée ou violée par un soldat romain nommé Panther. Mais ce statut de femme violée, contrairement à la morale actuelle qui condamnerait l’homme, l’a fait verser dans le clan des femmes fautives.
Marie était promise à Joseph, comme tous les mariages arrangés de l’époque. Ainsi Joseph accepta-t-il sa fiancée enceinte à l’âge de douze ans, et avança la date du mariage. Par son statut de bâtard, Jésus ne pouvait plus prétendre à des postes de notable. Très vite, sa famille d'accueil fut les rejetés, dans un monde déchiré entre plusieurs factions de juifs, sous une domination romaine.
Il ne laissera quasiment pas de trace. Jean le Baptiste ou Simon le Mage furent bien plus célèbres.
C’est son ratage, ou son anonymat, qui dut séduire les évangélistes. Sans famille et abandonné par ses amis, personne ne pourrait contredire l’invention de leur Jésus. C’est là que débuta l’invention du Christ.

Je raconte l’histoire qui précède, celle d’un Jésus de Galilée, (Nazareth n’existait pas à l’époque), jeune homme ballotté par la vie, plus victime qu'usurpateur, un jour athée puis l'autre aux pieds de Dieu, s’interrogeant s’il ne serait pas son élu.
Mon Jésus ne se remet jamais du mensonge de sa mère, et de la haine que lui voue son père adoptif.
Avant d'être dans le langage, ce Jésus est surtout dans la matière. Il souffre de n'être qu'une matière que le langage n'a pas reconnue, que le nom du père n'a pas estampillé. Il donne son corps à manger à tous pour se disperser, il est le corps de Dieu dont tous les hommes peuvent user et abuser, un corps non pas en vente libre mais en don libre qui ne lui appartient pas plus qu'aux autres.
Il n'a pas été nommé et c'est là son rapport avec Dieu. Il est ainsi éternellement vierge, et ne vieillit jamais comme le Dorian Gray d'Oscar Wilde, non pas parce qu'il aurait pactisé avec le diable, mais parce qu'il n'a pas été tout à fait commencé.
Sa circoncision, sceau d'alliance avec le Seigneur depuis Abraham, ne devient que trop vraie. Il n'a pas d'autre père et devient fils de Dieu car Joseph ne le rachète pas en payant les cinq sicles d'argent, comme il doit être fait pour reprendre tous les garçons nouveau-nés destinés au Seigneur.
Ce Jésus reste ainsi entre deux eaux, entre terre et ciel, entre insigne force et infinie faiblesse.