Patong Beach, Soleils noirs & nuits blanches

Quand, un beau matin d’hiver, l’enquêteur d’une compagnie d’assurance est convoqué à la Défense dans le bureau de son supérieur pour retrouver le responsable d’un détournement financier, il ne se doute pas que cette enquête va le mener beaucoup plus loin qu’il n’imagine. Il s’envole un peu avant Noël pour la Thaïlande sur les traces d'un inconnu.
Il ignore alors qu’il met le doigt dans un terrifiant engrenage qui, entre nuits blanches, néons rouges et soleils noirs va le mener dans des zones dangereuses où des belles de nuit et de mystérieux guetteurs veillent sur les entrailles du Monde et où une vie humaine a peu de valeur...

Il comprendra trop tard qu’il est des voyages dont on ne revient jamais…

Extraits

Depuis l’Expressway surélevé, Bangkok-la-tentaculaire s’étend aussi loin que porte mon regard. Un chaos urbain d’échangeurs autoroutiers, de tours ultramodernes, de façades crasseuses noires de coulures, de cafouillis de câbles. Des touches de couleur, celles des publicités. Les vieilles aux tons passés masquant les devantures pelées. Les récentes avec des femmes sexy vantant de la téléphonie mobile ou des réseaux bancaires arborant les mêmes couleurs que celles des taxis: vert et jaune, bleu et rouge, mauve, rose, orange. Peut-être pour oublier que la ville est gris sale, couleur de ce béton, de cet asphalte omniprésent. Un résumé de ce que j’imagine être une capitale d’emerging country. Au dessus de l’Expressway, un ciel blanc laiteux masque un puissant soleil qui mijote la ville à la vapeur. Le taxi passe une barrière de péage puis s’engage sur une bretelle de sortie. Des collégiennes en jupes plissées, chemisiers blancs et socquettes assorties traversent en chaussures noires basses les avenues avec un luxe de précaution. Le portable calé entre la joue et l’épaule, un homme en costume déjeune sous des parasols dans une cantine de rue installée au pied d’une de ces nombreuses passerelles de béton qui enjambent les avenues. Partout de la publicité, des enseignes, sur les façades, les commerces… HomePro, Wall Street Institute, Centre Point… Une planète commerciale. Des feux tricolores se balançant sur des câbles avec des comptes à rebours trop longs, d’autres publicités sur des pylônes de béton supportant des grappes de câbles (..)
Chaque homme passe sa vie à chercher une posture, une attitude qu’elle soit sociale, morale ou religieuse. Une position pas trop inconfortable, pas trop incohérente où il puisse atteindre une forme de repos, en attendant la mort. Comme les dormeurs de l’avion, la plupart du temps, nous ne parvenons jamais à atteindre cette contenance. Une quête inachevée de la sagesse qui constitue peut-être l’essence même de l’existence.
Dans ce Gogobar, seuls ou en petits groupes, les clients blasés reluquent les pouliches offertes en pâture. Des pénitents déprimés devant une bière qu’ils boivent par toutes petites gorgées, comme du thé bouillant. Des rapiats, des Cheap Charlies comme dit Fôn, qui font durer leur verre pour éviter une nouvelle conso. Ici comme à Bangkok, le touriste sexuel a le plus souvent la mine renfrognée, le regard morne et la chair triste. Tout rempli d’un ennui qui semble le poursuivre comme une ombre maléfique. Coucher avec des filles jeunes ne donne que l’illusion de la jeunesse, ne procure que l’apparence de la séduction. En réalité, rien n’est pire que ces corps dissemblables qui se pénètrent : cuir ridé contre peau d’infante, bouche fanée fouillant des lèvres vermeilles, chairs molles s’épuisant sur des corps vigoureux. Les miroirs des Gogobars ressemblent au portrait démultiplié de Dorian Gray où se reflète une jeunesse enfuie. Jusqu’à ces pilules bleues qui rappellent le désir évanoui. Jusqu’à cet éclair de dégoût dans les yeux des nouvelles qui n’ont pas encore appris à faire semblant. Les Gogos ressemblent à des temples païens où des damnés assis en cercle viennent célébrer le culte de leur jeunesse enfuie.


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