Nicotine

Patrick crevait d'envie (clope) d'une cigarette.
Une semaine qu'il (clope) avait arrêté, luttant (clope) contre l'envie à chaque instant, toujours (clope) hésitant à s'arrêter au tabac du coin pour s'en prendre (clope) un paquet, cédant alors, il ne le savait que trop bien (clope), à la tentation. Il se cherchait même des (clope) excuses à présenter à sa femme, cette sorcière (clope) qui voulait absolument le désintoxiquer, prétextant (clope) une charge de travail excessive, le stress (clope) ou tout simplement le (clope) fait établi et immuable que c'était (clope) lui le patron à la maison, jusqu'à ce (clope) qu'elle hausse ce fameux sourcil, celui qui laissait entendre : « tu es bien sûr de ce que tu prétends ? »
Alors il trompait l'envie (clope) en suçant ses stylos ou des pastilles au menthol. Il avait bonne haleine (clope) mais ça lui filait la chiasse. Il buvait du café très fort et très sucré, mais (clope) ça l’empêchait de dormir, il restait la première partie de la nuit (clope) les yeux écarquillés dans le noir, avec cette boule de nerfs (clope) à l'intérieur, qui réclamait à coups de dents et de (clope) griffes sa dose de nicotine. Il s'était surpris, au bureau, à rejoindre (clope) ses collègues à la pause uniquement pour (clope) inspirer à pleins poumons (clope) leur fumée. Une fois ou deux, on lui en avait (clope) proposé une petite et après un terrifiant combat intérieur (clope), il lâchait un timide « non merci, j'ai arrêté ». Mais (clope) l'envie s'était réveillée, (clope) la boule de nerfs qui criait (clope) en lui et (clope) qui ne lui laissait (clope) pas de répit (clope) lui dévorait (clope) les entrailles pour (clope) laisser un (clope) grand vide qui ne serait (clope) comblé (clope) qu'avec (clope) une (clope) (clope) (clope)
– Ta gueule ! hurla-t-il en serrant les poings.
Ses collègues sursautèrent et le regardèrent avec de grands yeux, comme s'il venait tout juste d’apparaître en criant depuis une autre dimension, celle des Repentis de la Fumette. Pause de dix heures avec café-gobelet. Ciel grisâtre pas beau. Martine de la comptabilité, la quarantaine trop maquillée, la cigarette entre deux doigts aux ongles rouges, Jennifer et Patricia, les deux potiches de l'accueil, serrées dans leurs manteaux noirs, Philippe de l'informatique, le lèche-botte du service. Lui, il ne fumait pas, il crapotait, ça se voyait, il faisait semblant pour avoir un prétexte, pour être à coté de M. Jacques, le directeur adjoint. Tous la (clope) au bec, dents jaunes, haleines chargées, frissonnant dans leurs beaux costumes et leurs tailleurs gris mais bravant le froid du trottoir pour tirer sur le cancer.
– Et bien ! fit M. Jacques. Qu'est ce qui vous prend ?
Patrick sentit le pourpre lui monter aux joues. Déjà, il n'avait plus rien à foutre parmi eux (sa place était désormais à l'intérieur, dans la salle de pause, avec les andouilles qui ignoraient tout du plaisir des inhalations de goudron et de cyanure d'hydrogène), en plus il était sous le vent, sa technique pour respirer la fumée de ses collègues en tabagisme passif ne fonctionnait pas aujourd'hui.
– Pardon, je sais pas ce que... J'arrête de fumer, vous comprenez ?

Lorsque les Bourdons envahissent le pays, gros comme le pouce et très agressifs, personne ne sait d'où ils viennent, ni pourquoi ils s'en prennent à certaines personnes. Quelque chose doit les attirer...

Première édition dans la troisième anthologie des éditions Malpertuis.

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Nous avons vérifié que ce livre était gratuit le 25 fév. 2021 - 08:51 Détails de l'offre