***Attention! "La Genèse Maudite" est un complément de lecture à la série "L'Archipel des Sorcières".***
Note du copiste :
Ce manuscrit que l’on m’a demandé de traduire et copier s’intitulait à l’origine « Testament de l’Esprit ». C’est son caractère hautement hérétique qui a conduit le très Saint-Père Clément VI à le renommer « La Genèse Maudite ». Le lecteur y trouvera une version improbable de la création de l’Univers et de l’histoire de l’humanité. Les parchemins sur lesquels sont inscrites ces paroles profanes ont été retrouvés au creux d’une urne enfouie dans la terre de Mayence, ville du Saint-Empire romain germanique, et seraient âgés d’au moins quatre cents ans.
La Naissance de l’Univers
Avant que le monde ne soit le monde, que l’Univers étende ses tentacules infinis vers ses confins inaccessibles, que l’astre du jour luise de son feu puissant, avant que toute chose n’existe, il y eut l’œuf parfait.
L’œuf est un monde limité, unique et solitaire. Ses limites contiennent la matière, l’essence de tout ce qui est, la possibilité première de tout ce qui pourra être. L’œuf est divin, le repère de la divinité intelligente qui, au faîte de sa puissance merveilleuse, brisera sa coquille pour exploser enfin et répandre sa présence magnifique dans tout ce qui n’est pas.
Depuis des milliards de lunes, la divinité s’approprie ce qui n’est pas et, magicienne surdouée, crée en ce vide abandonné les premières bases de l’existence et de la vie. Enfin libérée, l’énergie créatrice de la divinité s’épanouit et forge de ses mains habiles ce qui deviendra l’Univers.
C’est ainsi que naquit, en des temps immémoriaux, l’Univers céleste de la toute-puissante divinité. Depuis l’explosion de l’œuf parfait, la divinité s’émancipe et bâtit, étend son royaume plus loin que l’homme ne pourra jamais le concevoir.
La divinité n’a pas de corps, elle n’est en rien dominée par cette matière qu’elle utilise pour fabriquer les mondes. Elle est intemporelle, immortelle et existe depuis le début impossible de l’éternité. Elle est partout à la fois, veille sur toutes les époques, sur chacune de ses créatures. La divinité, depuis qu’elle a quitté l’œuf qui la contenait, se multiplie dans la beauté de son œuvre interminable. Depuis l’explosion et jusqu’à cette fin des temps qui n’arrivera jamais, la divinité créera, manipulera, donnera. Créatrice exaltée et parfaite, elle n’est que bonté et vérité, miséricorde et amour, chaleur et lumière.
Lorsqu’elle quitta la coquille qui la prévenait de disperser sa perfection dans le néant, la divinité brilla de sa lumière éblouissante. D’or et d’argent, la lumière originelle, que choisit d’être la divinité pour s’élancer vers l’infini, éclaira les ténèbres du vide qui n’eurent d’autre choix que de laisser la place qui n’existait toujours pas à son éclat mirifique.
L’Univers, enfant de la lumière originelle, la première création de la divinité merveilleuse, étira ses bras sublimes sur le néant qu’il embrassa avec le délice pur de l’extase divine. Depuis lors et pour les siècles des siècles, l’Univers, poussé par la magie propre aux dieux, court vers des frontières qu’il sait ne jamais trouver.
Nul horizon ne sera jamais assez vaste pour donner le plus infime aperçu de l’infini universel, aucun paysage ne saura jamais traduire la beauté irréprochable du monde parfait que nous accorde, par sa bonté, la divinité qui règne sur tout ce qui est.