De l'autre côté de l'écran

Morceaux choisis :

Une petite sieste dans le métro

« Derrière le guichet, se tenait un individu à la figure allongée, ses yeux étaient étroits et ses pupilles avaient une couleur jaunâtre, ses iris n’étaient que deux fentes d’un noir luisant. En voyant passer Célia, il laissa remonter ses lèvres sur ses crocs et sortit sa langue, très longue et d’un rose vif. Son visage entier était couvert d’un fin duvet brun, soyeux. Se collant contre la vitre, contre l’hygiaphone, il huma la jeune femme. La seule chose qui le retint, c’était que cette gourmandise n’était pas pour lui, elle était déjà réservée, mais il savait que ce genre d’occasion se reproduisait régulièrement et que son heure viendrait. »

Compter jusqu’à cent

« Il savait ce qu’il allait trouver : sa mère en pleurs dans la cuisine et son père affalé devant le poste de télévision, un verre de vin à la main. Sa mère aurait l’air d’avoir mal quelque part, chacun de ses mouvements s’accompagnerait d’une grimace, mais elle ferait comme si de rien n’était et lui dirait d’une voix neutre, basse, à peine audible, qu’elle finissait de préparer le dîner, qu’il serait prêt dans une minute. Elle lui demanderait de mettre les assiettes sur la table, en silence. Elle lui chuchoterait de ne rien casser, surtout. »

Deux femmes

« Je luttais contre l’envie de lui arracher le livre des mains et de l’en frapper. J’avais envie de déchirer sa figure lisse de mes ongles acérés, de la marquer de manière indélébile en longues et laides estafilades qui la rendraient indésirable, non consommable. J’avais envie de la jeter au sol et de la rouer de coups de pied jusqu’à sentir ses os craquer sous le cuir de mes chaussures. J’avais envie de l’entendre hurler, de l’attraper par les cheveux, de les lui arracher par poignées avec des plaques sanglantes de cuir chevelu en lambeaux. »

De l’autre côté de l’écran

« Ma nouvelle addiction était fort exigeante. Elle réclamait de moi des compétences dont j’étais certain d’être dépourvu. Il ne s’agissait pas d’acheter de la viande déjà morte. Il s’agissait de partir à la chasse. Pour moi, un chasseur était un être svelte, aux mouvements vifs. Je l’imaginais utilisant un arc et des flèches plutôt qu’un fusil. Je n’étais, a priori, pas à la hauteur. Après une intense cogitation, je me décidai à passer à l’action un soir où cette faim malsaine me taraudait. J’avais compris que je pouvais tirer avantage de mon physique. Qui se méfiait du gros avec son visage porcin d’ange dodu ? Qui se méfiait du souffre-douleur ? »

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