Blues de Novembre: Nouvelles Bleues

Ironie et tendresse se côtoient dans ces tragédies des humbles.
Des personnages colorés du Québec profond et urbain s’y pressent : un maire de la Côte-Nord hérite d’un iceberg, deux baby-boomers s’autodétruisent fascinés par leur vide intérieur, un politicien idéaliste devient en douceur véreux, un artiste du Plateau se perd dans les rôles qu’il endosse...
Sophie Pouliot écrivait dans La Presse : [...] les récits réunis sous le titre de [Blues de novembre] sont empreints de considérations politiques, sociales et humaines dont fait trop rarement état la littérature de fiction. Et ce n’est là qu’un des mérites que possède l’ouvrage d’Alain Gagnon. Les thèmes abordés dans ce recueil sont multiples, mais les méandres de la psyché humaine y trouvent certes une place de choix. Seront décrits les visions du monde d’un enfant autiste et d’un schizophrène, les comportements d’un individu drogué par ingestion abusive de comprimés variés, d’un autre forcé par autrui à recourir à la médication pour cause de rire excessif, d’une victime de l’alzheimer, d’un artiste, enfin, qui croit n’avoir aucune identité à force d’emprunter celle des autres en les imitant. Le tout est livré avec beaucoup de finesse [...].
S’il faut nommer une autre ligne directrice orientant ces nouvelles, mentionnons que quelques-unes d’entre elles dénoncent l’hypocrisie arriviste et l’incohérence existant entre les propos, les idées et les agissements des décideurs ou des militants, quelque noble que soit la cause qu’ils affirment défendre. Par exemple, dans Népé ou l’enterrement de première classe, le maire d’une petite ville mène une lutte acharnée afin que l’on cesse de vider la région de ses matières premières sans que celle-ci jouisse des fruits de leur transformation. Or ce preux maire battra en retraite lorsqu’il se sera senti aimablement méprisé par les véritables détenteurs du pouvoir ; rien à voir avec la gloire modeste, mais constante, associée à la mairie municipale.
Bref, ce dernier ouvrage d’Alain Gagnon ne manque pas d’intérêt. Puisque l’auteur s’est donné le mandat, à travers ses fables, de transmettre quelques opinions quant à différents sujets, on s’étonne moins des commentaires acerbes formulés à propos, notamment, de l’UNEQ, du NPD et des acheteurs de nouvelles antiquités usinées censées rappeler le terroir. Quant aux véritables prises de position à l’égard de la discrimination dont sont victimes les personnes pauvres, de la surmédication, du conformisme à tout prix et d’autres attitudes modernes discutables, elles savent éviter le piège du moralisme grossier. Si les histoires contenues dans ce recueil sont intéressantes, en plus de soulever des questionnements éthiques et de véhiculer des critiques sociales pertinentes, elles sont aussi superbement écrites. Le vocabulaire recherché d’Alain Gagnon ainsi que les images tantôt colorées, tantôt évocatrices que suggèrent ses phrases, assurent un surcroît de plaisir aux lecteurs. « J’y glisse avec l’aisance d’un habitué qui sait trouver confort, respect et whisky à l’autre extrémité de ce voyage initiatique pour Ulysse fessu. » Un ouvrage plein de grâce, mais surtout plein d’esprit.
Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon du Livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K (Pleine Lune, 1998). Quatre de ses ouvrages en prose ont ensuite paru chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale (2003), Jakob, fils de Jakob (2004), Le truc de l’oncle Henry (2006) et Les Dames de l’Estuaire (2013). Il a reçu à quatre reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire (Le Loup de Gouttière, 2003), L’espace de la musique (Triptyque, 2005), Les versets du pluriel (Triptyque, 2008) et Chants d’août (Triptyque, 2011). En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob (La Grenouille Bleue, 2010).

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