Tremblement de terre au ministère des Affaires alimentaires: Comédie

La bouche qui mange ne parle pas. Ce bel aphorisme des gens de bonnes mœurs est une vérité presque universelle. À une condition toutefois : le verbe manger doit se conjuguer à tous les temps de la faim, chez tout le monde sans discrimination sociale. Mais, même les créatures les plus dociles comme les moutons, taciturnes d’ordinaire, peuvent bêler et se rebeller quand vient à manquer l’herbe permanente pour leur panse gourmande. Et si cette crise alimentaire était le fait de quelques assoiffés de pouvoir tirant les ficelles pour ébranler le ministère en charge ?
Manger !
De tous les verbes conjugués depuis l’Antiquité, mère de la vie sur terre, il est celui qui fait le moins mal à la tête ; même si l’on commet une faute de langue contre la dent gourmande pressée à l’impératif présent qu’exige la faim. Il fait aussi moins mal au cœur ; lorsque tous les pronoms personnels de la communauté humaine le conjuguent en respectant les nombreux accords conclus par les assises du sommet des entrailles tenu depuis la tendre enfance en passant par l’adolescence jusqu’aux abords à haut risque de l’indécence sénile, qui pleure au soir de sa vie, une maigre pitance ; faute de faire bombance.
Mais, ce verbe est dangereusement perturbateur, provocateur et destructeur. On peut le vérifier chez les plus zélés professeurs, ès bouche gourmande. Ceux-ci s’amusent et imposent sa conjugaison aux temps passés, radieux et merveilleux ; où le ventre répondait, en écho rythmé, à la bouche pleine dont la parole s’étranglait de plaisir malicieux savourant les délices d’une délectation que procurait une alimentation abondante et variée ; alors que le présent de l’indicatif indique le point rouge d’une grève imminente de la faim ou plutôt d’une révolte contre la faim.
C’est le temps en question tant redouté par les gouvernants de la République du ventre qui arrive maintenant. Celui où les ministres de cette République universelle oublient de se mettre ensemble pour le conjuguer quand va éclater l’orage des appétits gloutons des uns et l’égoïsme des autres ; cet égoïsme légendaire du singe, mourant fruit à la main, indifférent aux pleurs de faim de ses petits ; qui fait que le « Tremblement de terre au ministère des Affaires alimentaires » trouble la quiétude du peuple des moutons.
Alors, dans ce pays des moutons tranquilles, maîtres du silence qui ruminent leur faim, on peut aussi se fâcher. On a le droit de marcher, de s’agiter, de parler enfin. Quand le muet parle, c’est le sourd qui l’entend. Et ce sont les brebis qui sont reines du ring pour la circonstance laissant leurs mâles béliers, bêler pour faire diversion en ruminant leur colère, leur misère, leur galère comme des phacochères manquant de bonne chère. Elles s’arcboutent, nos brebis effarouchées, et vont donc prendre le taureau par les cornes pour punir de manière particulière, l’insolence des méchants bergers qui ont osé toucher au nerf de l’univers : la denrée alimentaire.

Affamer le peuple pour provoquer un coup d’État : altruisme ambigu ou pur arrivisme ? Complot, crise alimentaire, procès... C’est la soif de justice et de transparence qui portent cette pièce de Pierre Ntsemou. Subversive et fantaisiste, cette mise en scène du manège politique dénonce les pouvoirs corrompus, les marionnettistes de l’ombre, les affairistes, tout comme elle réclame le réveil de la conscience citoyenne. Une satire acide qui n’épargne personne.

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Nous avons vérifié que ce livre était gratuit le 28 fév. 2021 - 04:23 Détails de l'offre